Note de la Conférence Episcopale d’Haiti (CEH) Suggèrant des Changements de Comportement et de Mentalité

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L’heure d’un nécessaire changement de comportement et de mentalité!

Soeurs et Frères dans le Christ Jésus!

Nous, les Évêques Catholiques d’Haïti, vous saluons avec respect et affection. Nous admirons votre capacité d’endurance et votre patience devant les épreuves et les calamités de toutes sortes qui se sont abattues sur notre pays ces derniers temps. Pour combien de temps encore votre courage sera-t-il mis à l’épreuve? Notre regard de Pasteurs et de citoyens sur la réalité actuelle de notre pays nous a fait découvrir que la source principale du mal qui ronge notre pays, c’est l’amour excessif de l’argent. Il change les valeurs de notre société, renverse les hiérarchies et en érige d’autres. C’est l’occasion de nous rappeler le constat fait par saint Paul dans sa première lettre à Timothée: “L’amour de l’argent est la racine de tous les maux” (1 Tm 6, 10). Mais il ne suffit pas de le constater, il faut agir pour déraciner ce mal.

1. Nous déplorons une situation de corruption endémique Nous avons lu avec attention et consternation les deux rapports d’audit publiés par la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif sur la gestion des projets financés par les fonds PETROCARIBE. Ceux-ci jettent une lumière crue et saisissante sur l’ampleur et la gravité déconcertantes du mal de la corruption dans ses divers mécanismes politiques et opérationnels. Notre pays traîne honteusement dans la corruption au plus haut niveau de la société. La corruption généralisée devient un mal endémique, une bourbe salissante, un fait dégradant, un vol organisé. Elle est devenue une véritable plaie sociale qui gangrène nos institutions, rend la politique malade, menace la démocratie et la paix sociale, et ainsi nuit gravement, tant d’un point de vue éthique qu’économique, au développement de notre pays.

2. Nous déplorons une situation socioéconomique catastrophique Nous voulons aussi rappeler le rôle important de magistrat financier ou la fonction cruciale de surveillance que la CSCCA est appelée à jouer dans la lutte incessante contre le fléau de la corruption à travers,, entre autres, l’exercice du contrôle strict de la gestion et des activités des Administrations publiques. Ce contrôle strict des dépenses devrait empêcher ou combattre la tentation, qui se répète chez ceux qui occupent des postes politiques ou administratifs dans notre pays, de gérer les fonds publics de manière non honnête et transparente, mais à des fins personnelles ou égoïstes et au détriment du bien commun. Le peuple haïtien s’attend à ce que ces deux rapports d’audit publiés par la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) ne soient pas classés sans suite. Dans sa juste colère et sa furie face à ce vaste scandale de corruption qui atteint ou éclabousse les plus hauts sommets de l’État, il exige que le procès PETROCARIBE ait bel et bien lieu. Et pour cause! Car l’argent qui a été dilapidé de mnière si éhontée, si scandaleuse, devait servir plutôt à l’amélioration de ses conditions de vie qui ne cessent de se dégrader chaque jour davantage.

3. Nous déplorons une situation d’instabilité politique macabre Nous déplorons sans détour ce mal qui paralyse à la fois la stabilité politique et la vie socioéconomique en Haïti. Nous déplorons du même coup le fait que notre pays se trouve systématiquement appauvri par la déconcertante avarice de certains dirigeants rapaces et sans conscience qui ne tiennent pas compte de la situation de misère du peuple en détresse. De tels dirigeants n’aident pas à l’avancement ni au développment du pays. La population haïtienne subit fort regrettablement les conséquences néfastes de ces agissements dans un environnement de torpeur et de désordre polymorphe. Car l’instabilité politique qui sévit en Haïti et les comportements indignes des politiciens sont sur le point d’inaugurer dans le pays “l’ère de l’ivresse assassine du sans-limite”; et nous assistons – dans presque tous les secteurs de la vie nationale – à une sorte de violence protéiforme dont nul n’est à l’abri.

4. Nous exhortons à un nécessaire changement L’heure n’est pas au règlement de comptes, mais bien à la reddition de comptes. L’heure est au changement, un changement réel, radical. Pour répéter saint Jean Paul II, “Il faut que quelque chose change ici!” parce que le peuple haïtien en a assez de souffrir, de croupir dans la misère. Nous demandons au peuple de distinguer ceux qui recherchent vraiment son bien. Pour que les choses changent, il faut à tous les échelons des pouvoirs et de la fonction publique des femmes et des hommes nouveaux par leur mentalité, leur conscience professionnelle et leur compétence. Voilà pourquoi notre intervention se veut citoyenne en mettant les acteurs politiques devant leurs responsabilités. Nous les exhortons à réparer les injustices sociales, à se soumettre à la justice de leur pays si c’est le prix à payer pour reconstituer l’autorité morale de l’État et de ses dirigeants.

Vu l’état alarmant et inquiétant du pays, nous exhortons tout le peuple de Dieu en Haïti à entrer dans la prière avec la neuvaine de la Pentecôte. Cette neuvaine se prolongera en une adoration allant de la Pentecôte 2019 à la Pentecôte 2020. Que cette abondance de prières soit comme une pluie de grâces et de bénédictions répandue sur le pays! Que Marie, notre Mère qui participa à la première neuvaine de la Pentecôte, veuille bien nous accompagner dans cette neuvaine et cette adoration en vue d’un nécessaire changement de comportement et de mentalité pour la libération d’Haïti!

Source: Conférence Episcopale d’Haiti

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