Analyse Comparative: Constitution amendée 1987 et Projet de Nouvelle Constitution

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Café civique du 21 avril 2021

DU RÉGIME REPRÉSENTATIF
Les Collectivités Territoriales, la Décentralisation
et les Rôles des Partis Politiques

Analyse Comparative:
Constitution amendée 1987
et Projet de Nouvelle
Constitution

LE CONSEIL INTERDÉPARTEMENTAL
(Suite du 20 avril)

Que nul n’ait rang de Secrétaire d’État
s’il ne réside dans la Région Métropolitaine!

Depuis la a genèse ou l’origine des Collectivités Territoriales, l’évolution de leurs perceptions varie non seulement d’un gouvernement à un autre mais encore des parlementaires aux gouvernements de transition. Pour les Républicains libéraux et progressistes, la démocratie participative, l’autonomie des Collectivités Territoriales et la Décentralisation constituent le poumon du développement d’Haïti tandis que Républicains conservateurs et centralisateurs considèrent ces nouvelles institutions comme des obstacles à leur paternalisme, leur vision d’être la courroie de transmission entre l’Administration centrale et la Province. Le café civique du 20 avril nous a présenté le bilan juridique des différentes familles politiques qui ont dirigé le pays du 7 février 1988 à nos jours. La création du Comité Consultatif Indépendant (CCI) par l’Exécutif pour élaborer un Projet de Nouvelle Constitution a provoqué une levée de bouclier, un tollé, une protestation généralisée. C’est dans cet esprit que nous allons présenter la proposition des 5 membres de ce Comité concernant le Conseil InterDépartemental.

En quoi consiste cette proposition relative à l’institution de ce Conseil InterDéPartemental, à sa composition, ses attributions et son fonctionnement?

En effet, sans avoir consulté la Fédération Nationale des Maires d’Haïti (FENAMH), la Fédération Nationale des Conseils d’Administration des Sections Communales (FENACA), la Fédération Nationale des Assemblées de Sections Communales (FENASEC) et la Fédération Nationale des Délégués de Ville (FENADEV), les 5 membres ont décidé unilatéralement de leur seule volonté de SUPPRIMER le Conseil InterDépartemental (CID) et les Assemblées des Sections Communales (ASEC).

Concentrons-nous sur notre sujet, à savoir le CID.

Une telle décision me surprend et révolte ma conscience civique. Je m’explique. Deux membres de ce Comité notamment Me Alexandre Boniface et le Général retraité Hérard Abraham ont contresigné les 5 Décrets sur les Collectivités Territoriales dont le Décret-cadre sur la Décentralisation contenant les articles 54, 55, 56 et 57 sur la composition, les attributions et le fonctionnement de ces Collectivités. Comment expliquer ce reniement et ce revirement?

Y avait-il deux visions et deux lignes de conduite lors de la transition 2004-2006? L’une conduite par l’ex-Président Alexandre et l’autre par le Premier Ministre Gérard Latortue. Je le dis parce que une amie de Miami m’avait invité à une conférence organisée par la Chambre de Commerce Americano-Haïtienne (AMCHAM). Après la Conférence, nous avons discuté avec l’ex-Premier Ministre qui était aussi un intervenant. Et j’ai appris qu’il était l’artisan des complexes administratifs dans les 9 départements, hormis l’Ouest. Il m’a aussi affirmé qu’il avait entrepris des démarches auprès de la BID pour le financement de ces Complexes qui font la fierté et le bonheur des gouvernants et des gouvernés. Je souligne à votre attention que le Décret fixant l’organisation et le fonctionnement des Sections Communales prévoit en son article 101 que ” ….la Section Communale dispose obligatoirement d’un complexe administratif qui regroupe:…..”. Où sont ces 572 complexes administratifs? L’exécutif et le législatif ne veulent pas d’infrastructures dans les Collectivités Territoriales Rurales. Ils préfèrent distribuer de l’argent au peuple et aux CASEC pour montrer qu’ils sont des partisans des autorités et de la Population. Mesdames, Messieurs, ces comportements doivent être bannis, supprimés de la classe politique.

À mon avis, par cette proposition, nos deux membres ont traduit leurs conceptions anticollectivités territoriales telles que voulues par les Constituantes et les Constituants de 1987, D’après ma compréhension, les 5 membres incarnent une vision traditionnelle, paternaliste, hostile aux masses urbaines et rurales. Ces dernières, héritières de l’affranchissement général des esclaves proclamé le 29 août 1793, par deux (2) Conventionnels de la République jacobine à savoir Sonthonax et Polvérel n’ont pas leurs places dans les lieux où les Caciques de Port-au-Prince décident de l’avenir des masses.
De même que St Domingue a fait l’histoire car ses ESCLAVES ont aboli l’esclavage avant la Métropole, avant la Convention, le 4 février 1974, de même les Collectivités Territoriales peuvent prendre leurs destinées en main en bousculant les préjugés et les idées reçues. Le Grand Principe de l’Égalité Politique et de l’Égalité Présidentielle doit triompher en 2021 en rejetant ce Projet de Nouvelle Constitution qui est une haine contre le Conseil InterDépartemental et les Assemblées de Sections Communales.
Concentrons-nous sur notre CONSEIL INTERDÉPARTEMENTAL sans lequel les COLLECTIVITÉS TERRITORIALES NE SERONT JAMAIS AUTONOMES.

” NÈG GRO ZÒTÈY GEN PLAS YO NAN PALÈ NASYONAL, NAN KONSÈY MINIS. YO GEN DWA PATISIPE NAN ELABORASYON LWA FINANS. NÈG MÒN SIVILIZE PASKE PITIT YO VWAJE. PITIT YO FÈ VWAJE TOU. YO WÈ KÒMAN MOUNB VIV. YO PAP PRAN KAKA POUL POU ZE NAN MEN PÈSÒN.”

Haïti, en 1804; a aboli “l’aristocratie cutanée”, mais une autre aristocratie a surgi: l’aristocratie résidentielle ou de lieu de résidence. DÉCAPITER les Collectivités Territoriales à travers son Conseil InterDépartemental et COUPER les pieds de ces dernières à travers ses Assemblées de Sections Communales, c’est retourner à la COLONISATION DE LA PROVINCE, c’est REPRENDRE le SYSTÈME de l’EXCLUSIF du PACTE COLONIAL ” TOUT PAR ET POUR LES COLONS BLANCS, TOUT PAR ET POUR LA MÉTROPOLE”.

Reprendre le Paternalisme et le Parrainage pour entrer à la Faculté de Médecine, à l’Académie Militaire à l’Éole des Infirmières trouver une nomination dans un ministère est RÉVOLU.

Avec les prescrits constitutionnels de 1987 ( 87 à 87.5) et ceux du décret cadre de la décentralisation ( 54 à 57), les parlementaires ne sont plus nos représentants auprès de l’Exécutif ni du judiciaire mais le CONSEIL INTERDÉPARTEMENTAL. Ces dix membres ont voix délibérative et assistent aux séances du Conseil des Ministres ( Constitution1987/ article 87.3) tandis que les Parlementaires ne pourront plus intervenir auprès du Président, du Premier Ministre et des Membres du Gouvernement. Tous ces rôles seront remplis par le Conseil InterDépartemental.
Pour moi, il y a une lutte féroce entre le Parlement notamment le Sénat et les Collectivités Territoriales. Ce sont des ENJEUX POLKITIQUES, des ENJEUX de POUVOIRS et de PRIVILÈGES entre ces DEUX INSTITUTIONS: l’une existant depuis les élections de 1988 et l’autre qui ne peut pas naître en raison de la jalousie du parlement et plus particulièrement du Sénat. La résolution du 5 juillet du Sénat est la manifestation de la volonté de cette institution de retarder le plus longtemps possible la constitution du Conseil InterDépartemental. Le Sénat a trouvé, après le Président de la République qui avait publié sa Résolution antiCollectivités Territoriales dans le Moniteur du 10 juillet 2017, un véritable Allié dans les 5 membres du Comité qui ont ÉLIMINÉ DÉFINITIVEMENT LE CONSEIL INTERDÉPARTEMENTAL.
Cette Résolution du 5 juillet n’a aucun sens vu que l’article 168 du Décret fixant le cadre général de la Décentralisation daté du 1er février 2006 ” abroge toutes Lois, ou dispositions de Lois, tous Décrets-Lois ou dispositions de Décrets-Lois, tous Décrets ou dispositions de Décrets qui lui sont contraires.” Alors, que faisaient les 48e,49e et 50e législatures ainsi que les quatre (4) Gouvernements qui ont succédé à la transition 2004-2006, à savoir l’Administration Alexandre/Latortue?

UN CONSEILLER INTERDÉPARTEMENTAL AVEC RANG DE SECRÉTAIRE D’ÉTAT! C’est du jamais vu dans l’histoire de la République. Le peuple a fait irruption dans la COUR DES GRANDS.

Participer à la Décentralisation des Finances Publiques, c’est empêcher aux Parlementaires de “KOUPE RACHE AVÈK PREZIDAN an, PREMYE MINIS , MINIS FINANS”.

Pour moi, les parlementaires veulent jouer un DOUBLE RÔLE : leur rôle de parlementaires et le Rôle du Conseil InterDépartemental., à savoir nommer les membres du Conseil Électoral Permanent, les Juges à la Cour d’Appel et des Tribunaux de Première Instance à la place de l’Assemblée Départementale et les Juges de Paix à la place des Assemblées Communales ou Municipales.

Comment peut-on accepter une telle violation de la Constitution par ceux et celles qui sont chargés, d’une part, de faire la loi, d’autre part, de faire appliquer la loi. Qu’on le veuille ou non, il y a une COLLUSION, c’est-à-dire une entente tacite entre les trois (3) pouvoirs pour ENTERRER LE CID et les ASEC.

En définitive, aucun partisan du Respect et de la Promotion des Droits des Collectivités Territoriales ne peut accepter ce Projet MATRICIDE, c’est-à-dire la mort juridique du CONSEIL INTERDÉPARTEMENTAL (CID) et des ASSEMBLÉS DE SECTIONS COMMUNALES (ASEC), MÈRES DÉFENDERESSES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES. Pour faire échec à ce Projet de Nouvelle Constitution, j’exhorte, d’une part, la FENASEC, la FENACA, la FENAMH et éventuellement la FENADEV, si elle existe, à écrire une lettre conjointe au Comité Consultatif Indépendant (CCI) pour leur demander de ne pas toucher à la Constitution jusqu’au la formation du Conseil INTERDÉPARTEMENTAL, d’autre part, les Associations amies de ces Collectivités à les appuyer dans leurs démarches si elles estiment que leurs institutions sont menacées.

Patriotiques salutations
Hérard LOUIS

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