La mort n’a jamais tué personne

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Par Jean SAINT-VIL 15 août 2015

Dire que la mort n’a jamais tué personne. Est-ce une idée saugrenue ? A l’échelle de la planète, 2 personnes meurent chaque seconde. Soit, 59 millions de disparitions par an. Quelle chance avons-nous de vivre quand 59 millions de personnes meurent chaque année ! Si on a vécu 50, 60, 70 ans, 80 ans ou plus il n’y a qu’un pas pour se rêver immortel. C’est souvent ce qu’on a tendance à croire en oubliant la mort, espérant pouvoir jouer éternellement les prolongations.


De quoi peut-on mourir ?


Quand on dit que quelqu’un est mort de sa belle mort, il ne faut pas pour autant accuser la mort de crime. La mort, dans son innocence, n’a jamais commis de crime. Ni de crime ordinaire. Ni de crime de guerre. Ni de crime contre l’humanité.


Traditionnellement, la mort est présentée par l’allégorie de la faux. Ce n’est qu’un mythe. La mort, toujours sans état d’âme, n’a pas d’arme, ni traditionnelle, ni moderne comme les armes chimiques ou nucléaires. Mais, elle peut en dériver comme les 70 000 morts de la ville d’Hiroshima qui ont été victimes du largage de la bombe atomique le 6 août 1945.


Les crimes, quelque soit leur nature, sont le fait de l’homme uniquement et jamais de la mort. On peut mourir de beaucoup de choses. On peut mourir de faim. On peut mourir d’accidents, de maladie, de tuberculose, comme on peut mourir le cancer, de noyade ou de brûlure.


Tout le monde sait de quoi on peut mourir puisque tous ceux qui sont malades ou qui se croient malades vont à la moindre alerte chez le médecin ou chez le guérisseur traditionnel.


Personne n’a jamais porté plainte contre la mort


Malgré leur grande douleur quand ils perdent un des leurs, aucune mère, aucun mari, aucune femme, aucun ami, aucun enfant n’a jamais osé porter plainte contre la mort. Ce qui serait d’ailleurs irrecevable.
Allez dans tous les tribunaux de par le monde, dans tous les commissariats de police, dans tous les cabinets d’avocats ou même chez les sorciers. Vous ne trouverez jamais une déposition contre la mort. Par contre, on peut déposer une plainte contre les mauvais médecins, les pharmaciens, les infirmières, les anesthésistes ou les hôpitaux pour erreur médicale ou pour négligence.


La mort n’a que des qualités


La mort n’a que des qualités. Je dirais même des qualités humaines. La mort est innocente. La mort n’a pas un brin de méchanceté. La mort est pour l’homme une amie et jamais une ennemie. Une amie universelle dont l’amitié repose sur les principes de base de la démocratie qui veut que sa loi est une pour tous. Une amie très fidèle, attachante, inséparable et indéfectible qui n’opère jamais à la tête du client et qui égalise en fin de vie les riches et les pauvres.
La mémoire de la mort est une mémoire d’éléphant. Puisqu’elle pense toujours à nous et qu’elle peut survenir ou sévir en toute circonstance. Elle n’oublie personne nonobstant l’âge, le rang, le sexe, la religion, la position sociale. J’ai connu une fillette qui croyait à tort que les femmes ne sont pas sujettes à la mort. Son argument. Puisque l’on dit que tous les hommes sont mortels, elle avait cru que les femmes étaient vouées à la vie éternelle. Et elle a eu la malchance de perdre successivement et presque d’affilée pendant un mois, sa grand-mère, cinq tantes et quatre sœurs pour se rendre enfin à l’évidence.


La mort peut être aussi une délivrance. Pour ceux qui ont trop souffert d’une maladie effroyable et qui demandent d’être euthanasiés. La mort peut être aussi une délivrance. Pour ceux qui en ont marre de vivre parce que la vie est dure sur terre. La mort peut être aussi une délivrance pour ceux qui disent avec un ouf de soulagement : MERCI LA MORT. A BAS LA VIE.


La mort nous donne le temps de vivre si on n’est pas mort-nés. Le temps de nous soigner en cas de maladie. Le temps d’aimer et de procréer. Le temps de faire l’amour en tout temps en tout lieu, même s’il arrive à certains de mourir faisant l’amour.


Faut-il avoir peur de la mort ?


Après tout ce qui a été dit sur la mort, ses qualités, sur son sens d’égalitarisme, vous comprenez qu’il n’y a aucune raison pour un homme ou pour une femme d’avoir peur de la mort. De la mort passe-murailles qui opère sans état d’âme. Sachons simplement qu’elle nous attend à l’heure qu’elle veut à un tournant. Au tournant de la rue que nous prenons chaque matin ou que nous empruntons pour revenir à la maison. Au tournant d’une maladie qui s’avère incurable. Au tournant de l’âge qui atteint ses limites. Au tournant de la vie quand nous en avons marre de tourner en rond ou en bourrique. Au tournant de nos amours quand nous abusons du Viagra comme des champions du sexe.
Habituons-nous à penser que la mort n’est rien par rapport à nous comme le dit Epicure. Mais, elle pèse de toute manière plus lourd dans toutes les balances que toutes les vies de la Terre et des cieux réunis avec sa dose mortelle de piqûre de rappel qu’elle peut administrer à tout instant pour mettre fin à la vie.


Habituons-nous à l’idée que la mort nous attend haut perchée sur ses pattes d’éléphant. Habituons-nous à savoir que la mort nous attend tous clés en mains pour nous ouvrir la porte du paradis, du purgatoire ou de l’enfer.
La mort n’est qu’un aboutissement normal et naturel de la vie quand on a rendu l’âme.


Qui d’entre vous est prêt à me croire maintenant pour dire haut et fort : La mort ne tue pas. La mort n’a jamais tué personne ?


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