Un gouvernement “démocratique” se fonde communément sur une constitution et sur les pouvoirs que cette dernière met en oeuvre: pouvoir législatif, pouvoir exécutif et pouvoir judiciaire. Toutefois, au cours du 20ème siècle un quatrième pouvoir s’est graduellement implanté, hors de tout cadre constitutionnel : le pouvoir médiatique. L’arrivée et l’évolution de la radio, ensuite de la télévision sont allés de pair avec le développement de la société de consommation. Ces medias contemporains sont devenus un vecteur séduisant pour faire découvrir des produits, mais aussi des idées.
L’objectif premier et la vocation des émissions présentées par les chaînes populaires, c’est de s’adresser au “temps de cerveau disponible” (selon l’expression d’un responsable de chaîne télévisée) pour lui vendre des produits ou des idées. Un message publicitaire sera d’autant mieux perçu et retenu qu’il touchera l’auditeur ou le téléspectateur à un horaire et sous une forme tels que le cerveau de l’auditeur ou du téléspectateur sera en état de disponibilité maximale. En gros, il s’agit d’aider les politiques ou les entreprises à vendre des idées à travers un “lavage de cerveaux”.
Le développement du numérique et de l’internet a favorisé les possibilités de communication et de matraquage idéologiques. Tout bascule! L’engouement pour les produits technologiques et l’interactivité , semblent ouvrir tout à coup de nouveaux droits au citoyen. Grâce à l’interactivité il a le sentiment qu’il peut lui-même devenir “journaliste” en créant son propre blog sur internet.
Le monde où nous vivons est rempli de techniques de marketing, tant politique que commercial. Des chercheurs développent études et analyses comportementales pour mettre au point les meilleurs moyens de rendre les messages agréables et persuasifs pour qu’ils produisent le résultat souhaité. Le pauvre cerveau du citoyen-consommateur, dont l’inconscient est sollicité et qui n’est pas formé à développer des analyses critiques des messages, se laisse prendre au piège des propagandes tant politiques que commerciales.
En Haiti, la situation est pire! Certains medias sont rien d’autre que des institutions commerciales dont la visée finale est le revenu et qui cherchent à captiver la vigilance du citoyen en le divertissant en permanence. Le lessivage de l’esprit règne quotidiennement en maitre. Mais ce n’est pas la seule tactique qu’utilise ce milieu médiatique pour canaliser l’attention.
Quand le contenu des programmes de radio et de télé affiche surtout des émissions de détente ou de distraction, n’est-ce pas promouvoir l’inactivité et le désintérêt de la vie sociale pour cantonner le consommateur-auditeur dans une condition infra-humaine ? Il suffit de regarder le contenu des grilles de programmes de certains médias pour mieux évaluer leur impact négatif. Endormir le citoyen-souffrant, c’est le meilleur moyen d’atteindre la cible et d’assurer aux politiciens médiocres et aux entreprises commerciales une propagande efficace.
Rares sont les médias désengagés de ce monde. Ceux-là cherchent à utiliser loyalement le monde de la communication pour contribuer à l’éducation à la citoyenneté et promouvoir l’intérêt de la grande majorité du peuple, les masses défavorisées qui ont été mises au rancart et qui ne bénéficient d’aucun droit.
Louis Louissaint, Triboland
