L’OTAN, une illusion désormais conjuguée à l’imparfait?

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Le dossier de L’OTAN et Donald Trump : une maîtrise avérèe par le Professeur Berg Hyacinthe.

Berg P. Hyacinthe. Ph.D.
Défense et Sécurité, Relations Internationales
www.interstellium.space

The current momentum is clearly moving against America. The possibility of striking a
miraculous deal with Latin America, despite the inescapable Guantanamo showdown, should
not be ignored. However, by way of any such deal, the Russia-Ukraine lease dispute runs the risk
of being translated into a major blow against NATO and U.S. interests in Europe (Hyacinthe
2009, p. 153).

« Le constat est irréfutable : le parapluie américain est définitivement fermé, le bouclier disparu
et la réassurance transatlantique une mortifère illusion. S’ils doivent un jour défendre libertés
et valeurs les armes à la main, les Européens ne pourront compter que sur eux-mêmes ». Tel est
le refrain de l’analyse issue de l’ouvrage « Cyber Warriors at War (p.153) », publié par cet
expert du domaine depuis 2009.

Il n’y avait ni Trump ni Covid-19 comme facteurs d’analyse en 2008. Le problème est
plus profond et les conséquences plus néfastes. Si les Chinois et les Cubains figurent sur la
liste des États-amis, bons gestionnaires de la pandémie, ce n’est pas le fruit du hasard.
Quand l’Union européenne (UE) dépend de ses partenaires intercontinentaux pour
lutter contre des menaces internes ou prendre certaines décisions stratégiques sensibles,
lesquelles ne sauraient être toujours dans l’intérêt immédiat de ces partenaires externes
(hors-UE), la souveraineté de l’UE est clairement menacée. Face à cette menace existentielle,
il est proposé une nouvelle approche aux (anciens) projets de la Constitution de l’UE et de
l’Armée de l’UE.

Parler d’une Constitution de l’UE ne renvoie pas automatiquement et directement à
l’ancien projet visant l’établissement de la Constitution de l’Europe. Le contexte est différent
et les enjeux sont énormes : Bruxelles fait état officiellement d’une « menace existentielle ».
La nécessité d’établir une stratégie visant la protection durable des intérêts des États
membres de l’UE se manifeste à travers ces deux documents fondamentaux : une proposition
de Constitution de l’Union européenne ; un livre blanc sur l’introduction de l’Armée de
l’Union européenne.
L’adoption de ces deux mesures enverrait un signal fort, tant aux concurrents qu’aux
détracteurs de l’UE. Il revient désormais aux Forces armées de l’UE, non à l’OTAN, de projeter
la prouesse militaire de l’espace Schengen, par des moyens offensifs, défensifs et dissuasifs.
Certes, les capacités offensives de cette Armée ne seront pas négligeables avec la
mutualisation des ressources de ses 27 États membres. Selon les chiffres officiels de l’UE, la
situation anarchique de l’actuel « régime militaire » de l’UE coûte entre 25 et 100 milliards
d’euros par an aux contribuables européens, notamment aux Français
(http://edition.cnn.com/2016/09/14/europe/juncker-state-of-theunion/index.html).
Dans l’immédiat, une simple résolution de l’UE créant deux commissions pour
travailler sur lesdits documents, constituerait une victoire nette en matière de stratégie de
dissuasion pour l’UE. Sur le long terme, ces projets apparemment « irréalisables », aux yeux
des plus incrédules, pourraient devenir les seuls atouts de l’UE dans le futur.
À cet égard, il revient aux parlementaires européens de manifester concrètement un
intérêt immédiat (stratégie « dissuasive ») et de travailler sereinement, compte tenu des
nouvelles donnes, pour offrir des options claires aux générations futures (stratégie ancrée
dans la prescience « longueur d’avance »). Il serait prudent, dans les conditions actuelles, de
se prémunir de ces actes constitutifs.
Dans l’intérêt suprême de l’UE, ces documents offriraient à la génération future un
avantage concurrentiel inestimable. Évidemment, le stratège qui détient une véritable
longueur d’avance sur la concurrence est capable de tout modifier, et ceci, dans son intérêt,
surtout avec des enjeux géostratégiques et socio-économiques ultra dynamiques, suivant une
tendance sinusoïdale. Au pire des cas, ces documents pourraient servir de base aux dirigeants
européens qui pourraient opiner, d’un côté ou de l’autre, sur cette problématique majeure,
une fois documentée.
Certes, l’idée n’est pas nouvelle. En revanche, plusieurs événements importants
justifient la nécessité de reconsidérer la juste valeur de ces deux actes constitutifs si
nécessaires à la survie du « projet » européen :

  • Les révélations de Snowden relatives aux relations de l’UE avec ses partenaires
    (hors-UE) de l’OTAN ;
  • L’annexion de la Crimée ;
  • Le Brexit ;
  • Les manifestations prononcées du syndrome téléguidé « diviser pour régner » au
    sein de l’UE ;
  • La mutation certaine de la cyber stratégie terroriste, pour éviter une liste exhaustive.
  • Les relations privilégiées bilatérales établies entre certains États membres de l’UE et
    plusieurs puissances militaires étrangères (hors-UE) se résument en suicide politique
    collectif de l’UE. Cette politique est susceptible de conduire à l’effondrement
    catastrophique de l’UE au profit de ces puissances étrangères à un moment où :
  • L’UE serait en désaccord profond avec la Russie;

L’UE serait en rupture avec l’Angleterre (concurrent potentiel de l’UE et partenaire
privilégié des États-Unis d’Amérique sur les grands dossiers);

  • L’UE serait en situation inconfortable vis-à-vis de ses États membres de l’Europe de
    l’Est ;
  • L’UE ne peut plus être considérée comme un « club ». Car elle a des intérêts
    économiques, militaires et géostratégiques, qui sont incompatibles avec ceux de
    certains partenaires (hors-UE) de l’OTAN. C’est un « virus caché » dans les relations
    internationales de l’UE avec ses partenaires hors-UE.
    Les partenaires hors-UE de l’OTAN ne sont pas concernés directement par les
    menaces politiques et socio-économiques « internes » aux membres de l’UE. Les origines de
    la dégénération des relations UE-Russie devraient faire l’objet d’une étude approfondie par
    une commission indépendante, afin d’identifier l’irritant réel, mettant de côté les
    propagandes américaines et russes. L’UE n’a aucun intérêt à maintenir une relation
    antagonique constante avec la Russie, et vice-versa. D’où l’intérêt de constituer ladite
    commission indépendante.
    En somme, la menace d’une éventuelle occupation virtuelle de l’UE est réelle.
    Toutefois, avec l’adoption d’une stratégie moderne de persuasion/dissuasion, l’UE a tous les
    moyens techniques, ainsi que les compétences intellectuelles requises pour forcer un
    revirement de la situation actuelle. Une combinaison de science et de prescience appliquée à
    cette stratégie pourrait constituer l’épine dorsale des futures négociations.
    Les autorités européennes conscientes de la nécessité de gagner le pari du ‟projet¨ de
    l’UE pourraient adopter cette stratégie dite de « dissuasion symétrique et réciproque »,
    appliquant ainsi la théorie d’équilibre de Nash dans les relations (UE-Russie, UE-UK, UE-Asie
    et EU-USA). Selon cette théorie, les puissances militaires alliées et/ou voisines seraient
    amenées à respecter de nouvelles règles suivant lesquelles aucun joueur/acteur n’aurait
    intérêt à changer de stratégie, au détriment d’un autre.
    Nota Bene : Dans la prochaine édition, H-O tentera de répondre à la question suivante :
    L’Union européenne étant en position de force, aujourd’hui, quelles sont les nouvelles
    menaces contre lesquelles devrait-elle se préparer ?
    Article initialement publié par l’hebdomadaire Haïti-Observateur, édition du 29 juillet
    2020, VOL. L, No.29 – New York, et se trouve en p. 5, 12, 13 à

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